La ministre et l’islamo-gauchisme : Une triste manœuvre de diversion
Le principe d’indépendance des enseignants-chercheurs est un principe fondamental reconnu par les lois de la République (art. L. 952-2 du code de l’’éducation) et rappelé par le Conseil constitutionnel (décision n° 83-165 DC du 20 janvier 1984).
Le SNIRS CFE-CGC attend de la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche et de l’innovation quelle défende toutes les libertés académiques et dénonce l’inanité de sa campagne contre l’islamo-gauchisme.
En ouvrant à l’envers le dossier des libertés académiques, en voulant soumettre les universitaires à une évaluation sur ce qui relèverait de la recherche ou non, la ministre commet un impair qui accroit d’autant la défiance, déjà élevée, de la communauté universitaire à son égard.
Alors que la crise sanitaire du COVID19 continue de ronger l’Université, la ministre ne semble en tirer aucun enseignement et confond les priorités. Pourtant celles-ci sont claires : décrochage massif des étudiants, précarité étudiante, recours massif aux contractuels, stagnation des budgets de recherche, loi de programmation de la recherche (LPR) promulguée sans qu’aucun enseignement n’ait été tiré d’une crise sanitaire qui a montré la relégation d’une partie de la recherche française.
Tout le monde s’accorde à reconnaitre que le terme d’islamo-gauchisme est l’objet de multiples interprétations, souvent peu fondées scientifiquement. Pour le mesurer, la ministre aurait eu grand profit à cet égard à se pencher sur les rapports du Haut Conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (HCERES), ce comité qui mobilise toujours plus de ressources au détriment de la recherche elle-même, voire sur la liste et le contenu des projets de recherche soutenus par l’ANR, dont elle fait l’alpha et l’oméga du financement de la recherche.
Le SNIRS CFE-CGC considère que la véritable question est celle de la défense générale des libertés académiques, libertés que les présidents d’université, qui devraient en être les garants, sont souvent, hélas, les derniers à défendre, préférant en appeler à un ministère qu’ils ont accompagné avez zèle dans les responsabilités et compétences élargies (RCE) puis la LPR.
Étonnamment, la ministre confie au CNRS la mission de surveiller les comportements des universitaires, leurs collègues de bureau. Le SNIRS CFE-CGC estime qu’il n’entre pas dans les missions du CNRS d’opérer une telle enquête et rappelle que l’Université dispose de son collège des pairs : le Conseil national des universités (CNU). Or, depuis sa nomination, la ministre n’a eu de cesse de marginaliser cette instance en réduisant ses compétences au profit de comités locaux, de jeux de pouvoir dans les couloirs des présidences des universités, de recrutements potentiellement hasardeux.
Le SNIRS CFE-CGC estime considère que le débat actuel est en grande partie lié à une méconnaissance de ce qu’est l’Université : un lieu d’enseignement, un lieu de recherches, un lieu de débat, et ces différentes activités n’ont pas les mêmes implications sur le plan intellectuel. Que l’on constate dans certaines études ou dans certains cours des dérives militantes cela n’est absolument pas nouveau. Mais les universitaires n’ont pas besoin d’un gendarme extérieur, ils sont à même de défendre par eux-mêmes les principes de tolérance et d’objectivité auxquels ils sont attachés.
Décision n° 83-165 DC du 20 janvier 1984 du Conseil constitutionnel : « par leur nature même, les fonctions d’enseignement et de recherche non seulement permettent mais demandent, dans l’intérêt même du service, que la libre expression et l’indépendance des personnels soient garanties par les dispositions qui leur sont applicables »
Article L. 952-2 du code de l’éducation : « Les enseignants-chercheurs, les enseignants et les chercheurs jouissent d’une pleine indépendance et d’une entière liberté d’expression dans l’exercice de leurs fonctions d’enseignement et de leurs activités de recherche, sous les réserves que leur imposent, conformément aux traditions universitaires et aux dispositions du présent code, les principes de tolérance et d’objectivité. »
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